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Vision avant-gardiste : les ententes conclues au Yukon tracent la voie vers la réconciliation

Elders and youth joined Yukon government and First Nation leaders at the Yukon Forum in January 2017. This Forum between the Yukon and First Nations governments was focused on reconciliation, collaboration and building a strong relationship between the Yukon and First Nation governments.
Elders and youth joined Yukon government and First Nation leaders at the Yukon Forum in January 2017. (Photo: Government of Yukon)

Selon Robin Bradasch, citoyenne de la Première Nation de Kluane, le terme réconciliation a plusieurs sens, et ce, depuis longtemps.

Au Yukon, onze Premières Nations ont conclu des ententes sur les revendications territoriales et sur l’autonomie gouvernementale avec le gouvernement du Canada et le gouvernement du Yukon.

Ces ententes sont des règlements négociés qui définissent la façon dont les peuples et les gouvernements autochtones et non autochtones vivront et travailleront ensemble au Yukon. Elles jouent un rôle de premier plan dans le processus de réconciliation sur le territoire et au Canada.

Mme Bradasch se souvient de l’époque où elle a pris part aux négociations de l’entente définitive et de l’entente sur l’autonomie gouvernementale de la Première Nation de Kluane. Pour elle, la négociation des ententes est désormais un mode de vie. Pendant douze ans, elle a pris part aux négociations touchant sa Première Nation et travaille depuis plus de dix ans à la mise en œuvre des ententes en collaboration avec le ministère des Affaires autochtones et du Nord du gouvernement du Canada.

La réconciliation consiste à renouer des relations amicales, à rétablir un certain équilibre et à corriger les erreurs du pass.

Robin Bradasch

Les membres des Premières Nations du Yukon sont résilients. Leur mode de vie a été complètement détruit. Pensons notamment à la « construction de l’autoroute de l’Alaska ou aux pensionnats indiens, les traumatismes n’ont fait que succéder. Ils n’ont obtenu le droit de vote qu’en 1960 et, treize ans plus tard, ils ont été les premiers au Canada à se pencher sur un document traitant des revendications territoriales globales », affirme Mme Bradasch.

Le document historique Together Today for our Children Tomorrow (Ensemble aujourd’hui pour nos enfants demain) (en anglais) présenté par les Premières Nations du Yukon au premier ministre du Canada en 1973 établit un cadre de référence pour la négociation des ententes sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale. De plus, il propose une vision visant à faire du Yukon un meilleur endroit pour tous.

La signature des ententes a nécessité beaucoup de travail acharné. Toutefois, grâce à celles-ci, une nouvelle façon de penser est en train d’influencer le gouvernement et la société. « Devons-nous forcément nous obstiner sur chaque phrase [dans les ententes], ou pouvons-nous concilier nos points de vue divergents? ... La mentalité commence à évoluer », indique Mme Bradasch.

Autonomie gouvernementale 2.0 – Restauration de l’autodétermination

Les ententes sur les revendications territoriales et sur l’autonomie gouvernementale (en anglais) du Yukon ont pour but de redonner aux Premières Nations et à leurs collectivités le pouvoir de prendre des décisions, affirme Mme Bradasch.  

« Depuis toujours, ces ententes cherchent à reconnaître des pouvoirs qui existaient déjà et à les rétablir », ajoute Mme Bradasch.

Brian MacDonald, citoyen des Premières Nations de Champagne et de Aishihik, est le sous-ministre adjoint des Relations avec les Autochtones du Conseil exécutif du gouvernement du Yukon. Il lui incombe de fournir des conseils sur la façon dont les ministères du gouvernement du Yukon peuvent collaborer avec les Premières Nations du territoire.

Je crois que les Premières Nations ont toujours été des gouvernements. Elles ont toujours été autonomes; elles ont gouverné leurs terres et leurs ressources... Toutes ces ententes, à mon avis, ne font que reconnaître une situation qui existait déjà

Brian MacDonald

Partenariat

Judy Gingell, dirigeante communautaire respectée et ancienne présidente du Conseil des Indiens du Yukon (désormais appelé Conseil des Premières Nations du Yukon), déclare avoir été confrontée de près au processus de réconciliation lorsqu’elle a pris part à la négociation de l’Accord-cadre définitif. Avant cet accord, les lois lui étaient imposées en raison de son statut de membre d’une Première Nation.

Judy Gingell lève le pouce après avoir signé l'accord-cadre définitif en 1993.

« La négociation de ces ententes a été une expérience très enrichissante d’un point de vue personnel. Cela m’a aidée à apaiser une grande partie de ma colère et de ma souffrance, et à mieux comprendre ce qui est réellement arrivé à notre peuple. Ces ententes sur les revendications territoriales sont un moyen de corriger les erreurs du passé; pour moi, c’est un signe de réconciliation», explique-t-elle.

Le partenariat est au cœur de nos ententes.

Judy Gingell

Le partenariat n’a pas toujours été la norme au Yukon. « Nous étions toujours laissés de côté. Notre opinion n’était jamais prise en considération au Yukon. Or, maintenant, nous sommes obligés de travailler ensemble. Nous devons unir nos efforts pour faire de ces ententes un succès », mentionne Mme Gingell.

L’établissement de partenariats est au cœur des ententes. Ils reconnaissent le droit des Premières Nations du Yukon de participer à la gouvernance du Yukon et offrent à tous les Yukonnais l’occasion de donner leur avis.

« Les ententes ont mis en place des processus qui établissent la manière dont nous pouvons mieux travailler en tant que voisins, mais aussi dont nous pouvons travailler efficacement en tant que partenaires. Cela est visible dans toutes les sections des ententes sur les revendications

territoriales », affirme M. MacDonald, en citant les comités et conseils qui gèrent la faune et les ressources, et qui procèdent à l’aménagement du territoire et aux évaluations environnementales. Ces ententes veillent à ce que tous les Yukonnais aient l’occasion de siéger dans ces organismes consultatifs.

« Cette vision reposait sur les principes du document Together Today for our Children Tomorrow (Ensemble aujourd’hui pour nos enfants demain) », affirme M. MacDonald.

Image of the Umbrella Final Agreement and 11 Yukon Final Agreements.

Célébrer la diversité

« Le succès de la réconciliation repose sur la volonté de tous les Yukonnais d’appuyer et de valoriser la diversité de la culture qu’offre le Yukon, affirme M. MacDonald. Les revendications territoriales représentent un grand pas vers la réconciliation. Elles jouent un rôle clé dans la manière dont nous avons réussi à aller de l’avant et à promouvoir la diversité des cultures. Elles évitent aussi la marginalisation des Premières Nations du Yukon. »  

En outre, les Yukonnais célèbrent désormais la culture des Premières Nations dans le cadre de divers événements tels que le Festival culturel Adäka, et les centres culturels des Premières Nations suscitent de plus en plus d’intérêt.

« Ce sont toutes des célébrations de la culture des Premières Nations qui ont été adoptées par les Yukonnais parce qu’ils reconnaissent sa valeur et souhaitent promouvoir cette diversité. Cela nous a permis de constater l’étendue de l’esprit de réconciliation au Yukon », mentionne M. MacDonald.

Le grand chef du Conseil des Premières Nations du Yukon, Peter Johnston, précise que les ententes permettent d’intégrer la culture et les modes de gouvernance traditionnels aux modes de gouvernance de l’Occident.

D’une part, nous devons préserver notre culture et notre histoire et, d’autre part, nous devons adopter une vision générale et globale pour le reste.

le grand chef Peter Johnston

« Nous avons le meilleur des deux mondes et il est très important que nos jeunes générations s’épanouissent, tout en valorisant ces deux aspects », déclare le grand chef.

Déconstruire le colonialisme

En ce qui concerne le gouvernement fédéral, le sous-ministre adjoint principal responsable des traités et du gouvernement autochtone pour le ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada, Joe Wild, est d’avis que la réconciliation consiste à reconnaître les droits des Premières Nations du Yukon et à collaborer dans le cadre de partenariats authentiques.

Pour moi, la réconciliation a pour but de déconstruire le colonialisme.

Joe Wild

Il est essentiel que les gouvernements aient la capacité d’évoluer au fil du temps. Pour ce faire, on peut notamment signer des traités modernes pour créer une nouvelle réalité qui ne repose pas sur les fondements de la politique coloniale tels que la Loi sur les Indiens ou bien favoriser des relations solides.

« Le Yukon est la plus grande région du Canada où l’autonomie gouvernementale s’est avérée efficace. Nous espérons que nos gouvernements autonomes servent d’exemple pour le reste du pays. De cette manière, le Yukon est à l’avant-garde de la réconciliation », affirme-t-il.

« Les ententes conclues au Yukon montrent la voie à suivre et sont la preuve d’une relation définie par les parties en cause, et non d’une relation imposée par une seule d’entre elles », ajoute M. Wild.

Afin de rétablir une relation, il faut notamment établir des intérêts communs et trouver de nouvelles façons d’élaborer les politiques gouvernementales. Le respect des gouvernements des Premières Nations, en tant que gouvernement, est la première étape.

« Pour commencer, le gouvernement fédéral prend davantage en considération le point de vue des Autochtones et l’expérience vécue par les Premières Nations autonomes, en plus de consulter ces gouvernements des Premières Nations en tant que gouvernements », affirme M. Wild.

« Nous concevons ensemble les politiques », conclut M. Wild.   

La nouvelle normalité

Aujourd’hui, les ententes conclues au Yukon représentent un mode de vie. Elles créent un système de gouvernance dans lequel il est obligatoire d’engager un dialogue constructif et enrichissant avec les Premières Nations. De plus, les ententes orientent les relations entre les citoyens et les gouvernements, en plus de contribuer à la réconciliation dans notre société.

« On reconnaît l’existence des gouvernements autochtones, et on admet qu’ils ont leur mot à dire sur notre façon de procéder... c’est juste une façon d’être », explique Mme Bradasch. 

Council of Yukon First Nations Grand Chief Peter Johnson presents symbolic gift to federal Minister of Indigenous and Northern Affairs Carolyn Bennett at the Intergovernmental Forum.